LA MAÇONNERIE À PIERRES SÈCHES : VOCABULAIRE

A VOCABULARY OF DRY STONE MASONRY

Christian Lassure


A   B   C   D   E   F   G   H   I     K   L   M   N   O   P   Q     S   T   U   V   W   X   Y   Z

CAILLASSE

Des cailloux, de la pierraille.

Angl. : broken stone

CALADAGE

En Provence et Languedoc, le terme caladage désigne le pavage, à l'aide d'éléments non normalisés, de sols de cours de maisons, d'aires à battre, d'écuries, de rues de villages (surtout celles en pente).

Ces surfaces pavées, ou calades, sont constituées de panneaux de pierres posées de chant, en rangées serrées, les interstices étant occupés par de la terre qui assure la cohésion du panneau.

La présence d'un remplissage de terre, s'ajoutant au fait que la calade est une structure horizontale et non verticale, rend abusive l'assimilation de la technique à celle de la maçonnerie à pierres sèches. Laissons donc ces ouvrages aux spécialistes des techniques de pavage.

Angl. : paving of paths - calade : paved area, paved path - calader : to pave (an area, a path)

©  Christian Lassure

CALAGE

Insertion de cales sous ou entre les pierres d'une maçonnerie pour les immobiliser. On distingue :

- le calage de pose, ou intérieur, purement fonctionnel, qui s'effectue en même temps que le mur monte,

- du calage de parement, ou extérieur, uniquement esthétique, qui consiste à enfoncer à force des cales dans les interstices d'un parement après achèvement du mur.

Cf. cale - pierre de calage.

Angl. : wedging - calage de pose : use of wedges (in laying stones) - calage de parement : use of pinnings

CALCAIRE

Dans la construction à pierres sèches, le calcaire est le matériau le plus représenté, simplement en raison de l'étendue des zones calcaires en France.

La diversité des faciès géologiques du calcaire se traduit non seulement par une diversité des formes sous lesquelles il se débite dans ses strates de surface : blocs et moellons réguliers (parallélépipèdes cubiques ou rectangles), blocs et moellons irréguliers, plaquettes (ou lauses), mais aussi par une dureté variable (par exemple, dans le seul département du Gard, on trouvera des calcaires coquilliers tendres dans les régions de Sommières et d'Uzès mais un calcaire dur et cassant dans la région de Nîmes).

Cependant, certains calcaires, très friables, se prêtent mal à une exploitation à sec.

Exemples d'emploi :

- En Provence, les couches de surface de la molasse burdigalienne se délitent facilement en éclats plus ou moins réguliers, pouvant être dégrossis à la martelette pour utilisation dans les appareillages, voire retaillés pour emploi dans les parties élaborées ou sensibles des édifices : chaînes d'angle, piédroits, linteau.

- Dans la partie centrale de la montagne de Lure (Alpes-de-Haute-Provence), entre 1100 et 1350 m d'altitude, les voûtes clavées en berceau ou les successions de coupoles encorbellées des bergeries, tirent leur matériau des affleurements rocheux du Barrémien supérieur, lesquels se délitent en plaquettes et écailles. Les gisements sont visibles sous la forme de petites excavations à côté des bâtiments. On y débitait de longues dalles atteignant jusqu'à 1,20 m pour des parements de 10 x 10 cm. Par contre, les lauses des couvertures ont été acheminées sur place depuis la partie supérieure du massif, entre 1400 m et le sommet, où règne l'étage géologique du Barrémien inférieur.

- À Fitou (Aude), le calcaire superficiel se débite en blocs très irréguliers (calcaire d'époque mésozoïque, allant du Trias au Crétacé inférieur), d'une mise en œuvre difficile, d'où le recours, par les constructeurs, à des arcs de moellons pour la voûte (arceaux juxtaposés) et pour le couvrement de l'entrée.

- À Nîmes (Gard), le calcaire superficiel donne des dalles minces, dures mais cassantes, peu aptes à servir de linteaux. Les bâtisseurs ont tourné la difficulté en protégeant ces dalles de la rupture au moyen de divers procédés de décharge.

Angl. : limestone

CALE

Dans une maçonnerie en pierre sèche, pour empêcher une pierre de branler on l'immobilise à l'aide d'un éclat en forme de coin, ou cale, inséré sous cette pierre et en arrière de celle-ci. Les cales servent en particulier à relever les pierres de parement pour qu'elles donnent un lit de pose horizontal ou légèrement incliné vers l'extérieur selon les besoins. Une règle impérative est que la cale comporte un angle aigu qui lui permette de bien s'enfoncer sous la pierre à caler.

On distingue traditionnellement les cales de pose, insérées intérieurement au fur et à mesure que le mur monte, des cales de parement, insérées dans les interstices du parement une fois le mur monté.

Il faut parfois essayer une dizaine de cales avant de trouver la bonne : une cale trop épaisse déséquilibrerait l’ensemble, une cale trop mince laisserait du jeu, et la solution « cale sur cale » ne vaudrait rien.

Cf. calage - pierre de calage.

Sources : 
- Alan Brooks, Dry Stone Walling, a Practical Conservation Handbook, The British Trust for Conservation Volunteers Ltd, London, June 1977, 120 p.
- Jean Chesneaux, Les pierres du Larzac, dans Gardarem lo Larzac, No 170, février 1992.

Angl. : wedge, wedge stone - cales extérieures : pinnings (pl)

CARREAU

1/ Au sens strict, pierre dont la longueur se trouve dans l'axe longitudinal du mur et qui repose sur son côté le plus étroit (c'est-à-dire de chant). On dit aussi « pierre en carreau ». 

Angl. stretcher on edge

2/ Au sens large, pierre dont la longueur se trouve dans l'axe longitudinal du mur et qui est posée soit sur le côté le plus étroit, soit sur le côté le plus large. Syn. dans ce dernier cas : panneresse.

Angl. : stretcher

CARRIÈRE

La carrière, c'est-à-dire le lieu d'extraction de la masse rocheuse mise à nu par l'enlèvement de la découverte, reste une solution marginale et exceptionnelle dans l'approvisionnement en matériau de construction à sec (fourniture de lauses pour la couverture, de beaux blocs pour l'encadrement de l'entrée par exemple).

Angl. : quarry - blocs de pierre extraits de carrière : quarried blocks of stone

Cf. découverte.

CHAÎNAGE

1/ Opération de renforcement d'une maçonnerie au moyen d'une chaîne.

2/ Le résultat de cette opération, c'est-à-dire la chaîne elle-même.

Angl. : 1/ masonry reinforcement; 2/ stone pier

CHAÎNE D'ANGLE

Dispositif de renforcement de la maçonnerie à l'angle de deux murs.

Syn. : chaîne d'encoignure.

Angl. : right-angle quoins/coins (pl)

Cf. chaîne verticale.

CHAÎNE D'ENCOIGNURE

Dispositif de renforcement de la maçonnerie à l'angle de deux murs.

Syn. : chaîne d'angle.

Angl. : right-angle quoins/coins (pl)

Cf. chaîne verticale.

CHAÎNE VERTICALE

Pilastre de gros blocs équarris – ou libes – renforçant un mur dans sa longueur ou à ses extrémités ou encore l'angle de deux murs.

Le chaînage intermédiaire est disposé à intervalles réguliers dans un mur de grande longueur.

Le chaînage de fin de mur vient terminer celui-ci.

Le chaînage d'angle est constitué par le croisement l'un sur l'autre de blocs de pierre dont les faces visibles en parement sont surfacées et les faces noyées dans la maçonnerie laissées brutes. Les blocs sont de taille décroissante vers le haut des murs.

Chaînage d'angle d'un couvrement pyramidal (Faycelles, Lot). © Christian Lassure.

Angl. : stone pier

CHANT

Le chant est la face étroite d’un parallélépipède et, partant, le plus petit côté de la section d’une pierre équarrie.

Des pierres « de chant » ou « sur chant » sont des pierres posées sur la petite face, le sens de leur longueur étant horizontal et celui de leur largeur vertical.

Si, au contraire, les pierres sont posées avec leur longueur dans le sens vertical, elles sont dites « de bout ».

Si, enfin, les pierres sont posées sur la grande face, le sens de leur longueur et celui de leur largeur étant horizontaux, elles sont dites « de plat » ou « à plat ».

On écrivait autrefois également « champ », qui est une orthographe vicieuse, issue d’une confusion de sens.

Angl. : narrow cant/edge/side (of a stone) - être posé de chant : to be set on edge, to be set edgeways/edgewise

CHANTEPLEURE

Etroite fente verticale pratiquée dans un mur de soutènement pour l'écoulement des eaux d'infiltration.

A dire vrai, il n’est pas nécessaire de pratiquer des chantepleures (ou barbacanes) dans un mur de soutènement en pierre sèche. Il suffit en effet de « desserrer » les joints verticaux à intervalles réguliers pour obtenir des substituts de chantepleures. On laissera donc ces dispositifs aux murs de soutènement maçonnés avec du mortier et, de ce fait, sans possibilité de drainage. 

La seule chose à laquelle il faut veiller est de laisser des interstices d’écoulement à la base du mur, surtout en région à fortes précipitations.

Syn. : barbacane.

Angl. : weephole

CHAPERON

Couronnement du faîte d’un mur de clôture.

Cf. couronnement de mur.

Angl. : cope, coping - topstones (pl)

CINTRE

Assemblage de charpente servant, lors de la construction, à soutenir les pierres d’un arc ou d’une voûte clavés en attendant d’y placer les clefs pour les fermer.

Angl. : truss of an arch, truss of a vault, centring (brit.) / centering (amér.), centres (brit.) / centers (amér.)

CISEAU 

Tige de fer terminée par un tranchant.

Angl. : (mason's) chisel

CLAPE

Sur la commune de Gordes, dans le Vaucluse, nom en français local donné aux grandes lauses calcaires ayant servi de matériau de construction aux grandes et petites « nefs » en pierre sèche qui en ornent la partie ouest.

Epaisses de 10 à 15 cm, ces dalles ont été extraites de « découvertes » faites dans le socle rocheux ou retirées du sol lors de travaux de défonçage et d'épierrement.

En général, ces lauses étaient équarries pour en faciliter la pose : on trouve souvent, à côté de la cabane, un tas de pierrailles qui sont les éclats de ce travail d'équarrissage.

Source : Christian Lassure, « Les Cabanes » à Gordes (Vaucluse) : architecture et édification, dans L'architecture vernaculaire rurale, suppl. No 2, 1980, pp. 143-160, en part. p. 146.

Angl. : limestone slab

CLAVEAU

Le claveau est un élément en forme de coin, d'un arc ou d'une voûte. Le pan oblique par lequel un claveau s'appuie sur le claveau voisin est dit « lit en coupe ». Lorsque ces appareils sont vus de front, les lits en coupe convergent au même point et, des sommiers au faîte, se rapprochent progressivement de la position verticale.

Le claveau ne doit pas être confondu avec le voussoir, qui est un claveau à douelles, c'est-à-dire aux pans supérieur et inférieur cintrés faisant partie respectivement de l'extrados et de l'intrados de l'arc ou de la voûte. Le voussoir relève de ce fait d'un niveau technique et architectural plus élevé que celui des édifices de pierre sèche.

Angl. : (d'arc) arch stone, (de voûte) vault stone - voussoir : voussoir

CLÉ (OU CLEF)

La clé est le claveau formant le faîte d'un arc ou d'une voûte.

La clé d'un arc s'appuie à droite et à gauche sur une contreclé (ou contreclef).

Certains arcs clavés n'ont pas de clé; à la place ils ont un joint de faîte.

Angl. : keystone - (à douelles) centre voussoir - contreclé : archstone adjoining the keystone

CLÉ HORIZONTALE

Dans les murs en pierre sèche construits selon la technique du double parementage enserrant une fourrure, l'absence de boutisses parpaignes (traversant le mur de part en part de manière à solidariser les parements entre eux) peut être compensé par un succédané, à savoir la clé horizontale : la queue d'une boutisse non parpaigne d'un parement est prise en tenaille par les queues de deux boutisses non parpaignes du parement opposé, l'une en dessous, l'autre au-dessus, formant ainsi une sorte de « clé ». On peut parler d'« assemblage en tenaille »

Angl. : interlocking headers (litt. « horizontal keystone »).

 


COINS EN FER

Outils de carrier servant à extraire et à fractionnner des blocs de pierre dure et compacte.

Le long d'une ligne de rupture, des logements de coins (ou emboîtures) sont creusés, à intervalles réguliers, à la broche et la massette. Puis les coins sont mis en place et un pointillé est piqueté dans leur axe. Pour finir, les coins sont frappés à tour de rôle à la masse jusqu'à ce qu'une fêlure se forme entre eux et devienne assez large pour qu'on puisse y insérer une pince et séparer les deux quartiers de roche.

Bruno Fadat et Raymond Martin rapportent que dans les Cévennes gardoises les coins en acier ont servi, aux côtés de la barre à mine et du pic, à la création de parcelles cultivables. 

Sources : 
- Jean-Paul Adam, La construction romaine. Matériaux et techniques, coll. Grands manuels Picard, Paris, 1984, en part. pp. 32-33.
- Alan Brooks, Dry Stone Walling, a Practical Conservation Handbook, The British Trust for Conservation Volunteers Ltd, London, June 1977, en part. p. 60.
- Raymond Martin, Bruno Fadat, Les terrasses des Cévennes gardoises, Editions de l'Equinoxe, Marguerittes, 1994, en part. p. 15.

Angl. : steel wedges - cales de coins : shims

CONSTRUCTION PAR ÉPAULÉES

Construction d'un mur non pas assise après assise sur toute sa longueur mais par tranches successives sur toute sa hauteur. L'épaulée est donc une de ces élévations.

Angl. : building (a wall) by successive lengths

CONTRE-FRUIT

Obliquité d'un mur qui se déverse vers l'extérieur ou qui surplombe légèrement.  

Cf. déversement - fruit.

Angl. : counter batter

CONTREMUR

Mur bas, à un seul parement, édifié parallèlement contre un autre mur plus élevé et avec lequel il n'a aucun liaisonnement.

Appliqué contre la paroi extérieure d'une cabane, il permet de renforcer ou de contenir le mur initial si celui-ci menace de s'écrouler.

Appliqué contre la paroi en aval d'un mur d'enclos, il permet de se débarrasser rationnellement de la pierraille extraite du champ.

Certains murs peuvent conjuguer ces deux fonctions.

Angl. : buttress wall

CORBEAU

Pierre laissée en saillie sur le parement d'un mur de façon à soutenir un élément d'architecture.

Cf. encorbellement.

Angl. : corbel

COUP DE SABRE

L'expression imagée « coup de sabre » désigne traditionnellement une succession de joints verticaux alignés, visible dans le parement d'un mur. Cet alignement vertical des joints, qui va de pair avec la pose des pierres « en pile d'assiettes », est considéré comme un défaut de construction, source inévitable de désordres.

Effectivement, une règle élémentaire de la maçonnerie à sec est l'imbrication verticale des pierres lors de la superposition des assises, de façon à obtenir des joints croisés ou découpés. Le respect de cette règle renforce la cohérence de la maçonnerie et la stabilité du mur.

Cf. imbrication verticale (des pierres) - pile d'assiettes.

Source : C. Lassure, Essai d'analyse architecturale des édifices en pierre sèche, dans L’Architecture rurale en pierre sèche, suppl. No 1, 1977, pp. 1-60 + 20 fig. h. t.

Angl. : seam of uncrossed joints (litt. « sabre cut »), running joint

Badefols-sur-Dordogne (Dordogne) : Embrasure extérieure d’un regard. En alignant le côté du montant de droite avec le bout correspondant du linteau, on a involontairement créé un « coup de sabre ». © Jean-François Pitiot.

COURONNEMENT

Rang terminal de pierres d'un mur. Dans sa plus simple expression, il consiste en une assise de pierres plus grosses et plus lourdes venant chaîner horizontalement et charger les assises inférieures.

Angl. : cope, coping - top, topping

COURONNEMENT DE DALLES HORIZONTALES

Il s'agit d'un rang terminal de dalles quadrangulaires aussi larges que le mur ou débordant d'un côté (débord unilatéral), voire des deux côtés (débord bilatéral). Ce dispositif est caractéristique de murs de clôtures appartenant à des propriétaires privés aisés.

Le débord unilatéral est du côté extérieur à l'enclos lorsqu'il s'agit d'interdire l'accès de celui-ci à des intrus. Il peut être du côté intérieur lorsqu'il s'agit d'un enclos à garenne d'où l'on veut empêcher les lapins de sortir.

Le débord bilatéral se rencontre dans ces mêmes enclos lorsqu'il faut non seulement retenir les lapins mais aussi les protéger des renards.

Ces dalles débordantes peuvent être à leur tour chargées de pierres.

Angl. : coverband of throughstones

COURONNEMENT DE LAUSES « EN ÉPI »

Il s'agit d'un rang de lauses posées de chant, parfois perpendiculairement au mur mais généralement en oblique, à la façon d'une rangée de livres sur une étagère. Il charge le mur et dissuade animaux et maraudeurs des velléités d'escalade et de franchissement, surtout lorsqu'il y a alternance systématique d'une lause haute avec une lause basse.

Il arrive que des murs de clôture très élevés comportent à mi-hauteur, des longueurs de pierres posées en épi : il s'agit de l'ancien chaperon du mur avant son surhaussement à la suite d'un nouveau défoncement-épierrement de la parcelle qu'il borde.

Angl. : coping of upright or tilted stones

COUVREMENT

Par couvrement, il faut entendre, au sens large, la structure employée pour couvrir une portion d’espace.

Dans les édifices en pierre sèche, le couvrement (ou partie de couvrement) désigne l’ensemble formé par la voûte à l’intérieur, qu’elle soit clavée ou auto-clavée, et la toiture de lauses ou le revêtement de moellons à l’extérieur.

Angl. : roofing


© CERAV
Le 25 décembre 2001 / December 25th, 2001 -  Réactualisé le 2 août 2002 - 28 août 2006 - 3 février 2008 / Last updated on August 2nd, 2002 - August 28th, 2006 - February 3rd, 2008.

Référence à citer / To be referenced as :

Christian Lassure
La maçonnerie à pierres sèches : vocabulaire – Lettre C (Vocabulary of dry stone masonry Letter C)
http://www.pierreseche.com/vocabulaire_pierreseche_C.html
25 décembre 2001

page d'accueil                         sommaire maçonnerie

 

ARCHITECTURE VERNACULAIRE

CERAV