OUVRAGES REÇUS / BOOKS SENT TO THE EDITOR

Stonechat

No 23, Spring 2011

Dry Stone Walling Association North Wales Branch

 

Compte rendu : Christian Lassure

Au sommaire de ce numéro printanier de Stonechat concocté par Sean Adcock :

Dr. Stephen Walker, The Nine Standards: a line of dry stone cairns in Upper Eden, Cumbria / Les Neuf drapeaux : un alignement de monjoies en pierre sèche dans le district du haut Eden dans le comté de Cumbrie, pp. 3-6

Les Neuf drapeaux (*) sont neuf monjoies de pierres (cairns en anglais) construites à la queue leu leu sur le sommet dit Nine Standards Rigg de la colline dite Hartley Fell (fell signifiant colline dans le parler local) de la chaîne des Pennines. Nine Standards Rigg domine la vallée du haut Eden et la ville de Kirkby Stephen en Cumbrie, un comté du nord-ouest de l'Angleterre (anciennement Westmoreland). Ces cairns se dressent non pas sur la crête mais sur la ligne d'horizon que l'on voit depuis la vallée. S'étirant selon un axe nord nord-est sud sud-ouest, l'alignement fait dans les 75 m de long.

Moutons paissant sur Nine Standards Rigg, à 4 km de Heggerscales en Cumbrie (Angleterre du Nord-ouest). Ils sont à côté des  « Neuf drapeaux », alignement de monjoies de pierre sèche. Auteur : Philip Barker. Autres photos de l'alignement : sur Wikimedia Commons.

 

Selon une légende locale, ces monjoies étaient censées simuler un camp militaire pour dissuader les Écossais d'envahir la région avant l'Union avec la couronne en 1603. En période de danger, les fabriques de pierre auraient été drapées de bannières colorées. Selon une autre légende, il s'agirait de repères ou de bornes. Des archives en signalent la présence dès 1534-1538.

Leur hauteur varie de 2 à près de 4 m. Leur plan est circulaire, sauf pour la monjoie la plus au nord, qui est carrée. L'une d'elles est pyramidale, une autre est à degrés.

Du fait des alternances de gel et de dégel pendant l'hiver, elles finissent par s'effriter et sont régulièrement rebâties par les visiteurs du site. La dernière campagne de reconstruction date de 2005 : les quatre structures les plus au nord ont été refaites.

L'auteur envisage la possibilité d'une plus grande ancienneté en raison de la proximité de vestiges de l'Âge du bronze et du Néolithique. Il évoque aussi une méthode de datatation par le lichen. Autant de considérations qu'aucun archéologue ou historien chevronné ne retiendra. Pour qu'une dizaine de monjoies de cette taille aient pu être reconstruites à chaque génération pendant trois millénaires et parvenir intactes jusqu'à nous, il aurait fallu une société pérenne chargée de leur entretien et de leur réfection, et surtout d'une bonne raison de ne pas les laisser à l'abandon. Si ce genre de société venant du fond des âges existe, c'est uniquement dans des bandes dessinées.

(*) Traduction en français que nous avons trouvée dans un Dictionnaire géographique universel contenant la description de tous les lieux du globe intéressans... de 1830, publié par A.-J. Kilian : « NINE-STANDARDS (neuf drapeaux), mont d'Angleterre, comté de Westmoreland, dans l'Est-ward; à l.E.S.E. de Kirkby-Stephen, sur la limite du comté d'York. Sommet par 54° 27' 2'' de lat. N. et 4° 36' 12'' de long. O.; à 2,136 pieds au-dessus de la mer ». Le terme anglais standard a le sens d'étendard mais aussi le sens de support, colonne.

Sean Adcock, A modern beehive oven, p. 6

Signalement de la construction d'un four et d'une cabane en pierre sèche en forme de ruches anglaises par le maçon irlandais Pat McAfee.

James Gage, Native American stone cairns: a brief overview / Monjoies de pierre des indigènes d'Amérique : rapide survol, pp. 7-10

Les missionnaires puritains américains rapportaient que leurs guides indiens ajoutaient pieusement une pierre aux cairns de chemin selon la tradition de leurs aïeux. Les peuplades indiennes érigeaient des cairns également en guise de sépulture, de monument à la mémoire d'un individu ou en souvenir d'un événement, ou pour marquer le scellement d'un traité. Ces pratiques ne concerneraient que 5% des centaines de milliers de cairns existant en Amérique du Nord.

Les cairns étudiés par l'auteur se présentent sous la forme de groupements de 10 à 100, voire davantage. Ils se répartissent en trois grandes catégories morphologiques.

1/ Les cairns à même le sol.(ground cairns)
Ce sont pour la plupart des cairns isolés (sauf quelques-uns reliés ou incorporés à des murs), en forme de monticule généralement non parementé mais parfois aux parois verticales. En plan, ils sont circulaires, ovales, carrés, rectangualires, triangulaires, oblongs, voire irréguliers.

2/ Les cairns sur un socle de pierre (base stone cairns).
Ce sont des amas de pierres reposant sur un rocher isolé, une grande dalle, le socle rocheux ou un affleurement. Les amas construits sur un rocher isolé présentent diverses configurations : pierre juchée au sommet, quelques pierres, une seule assise de pierres. Quelques rares amas sur socle de pierre adoptent une forme géométrique (cône, carré, rectangle).

3/ Les cairns à fentes (split stone cairns).
Cette catégorie englobe le rocher isolé, le socle rocheux mis à nu, l'affleurement comportant une ou plusieurs fentes qui sont remplies en partie ou en totalité de petites pierress. Dans certaines fentes, des coins de pierre sont enfoncés (split wedge cairns).

On note des variantes et des particularités : ajout d'une pierrre posée en demoiselle (c'est-à-dire avec sa plus grande dimension en parement dans le sens vertical) , ménagement d'une niche latérale, bloc de quartz disposé bien en vue. Certains amas sont même construits dans le lit d'un cours d'eau ou en travers de celui-ci.

L'auteur veut voir dans ces ensembles de cairns des sites cérémoniels indiens liés au cycle des saisons. Ces sites lithiques se rencontrant dans toute l'Amérique du Nord, cette tradition aurait été partagée par nombre de groupes culturels indigènes avant l'arrivée des blancs.  Mais cette thèse ne s'appuie sur aucune source écrite ou orale.

Une autre interprétation, plus terre à terre, est envisageable à notre avis : celle de défrichements agricoles intervenus au cours de la conqête du continent, avec abandon des sites au bout de quelques années en raison de l'épuisement des sols et de l'absence d'engrais. Les amas seraient alors des épierrements visant à dégager du terrain le maximum de pierres, lesquelles, arrachées à la parcelle, étaient empilées là où ne pouvait pas cultiver : rocher isolé, socle rocheux mis à nu, affleurement, etc. Les fentes des rochers seraient alors non pas des portails d'entrée dans le monde souterrain mais le résultat d'un effort visant à fractionner le rocher en blocs plus petits pour les évacuer. Ces vestiges lithiques sont dans des sous-bois qui ressemblent fortement aux champs retournés à la friche à la fin du XIXe siècle que nous avons pu observer en France, dans le département du Lot, dans les années 1970.

Gras de Joyeuse en Ardèche : tas de pierres parementés résultant du dérochement du terrain pour faire des parcelles agricoles au XIXe siècle. : la friche reprend lentement mais sûrement ses droits. Photo Michel Rouvière.

 

Sean Adcock, The Balmoral cairns, pp. 10-14

Étude de dix cairns mémoriels (en pierres liées) qui, depuis l'époque de la reine Victoria, ornent le domaine royal de Balmoral (the Balmoral Estate), dans la région écossaise d’Aberdeenshire. Pour les amateurs de fabriques de pierre, il existe un circuit ou parcours des cairns de Balmoral.

David Perry, Arte Sella, pp. 15-17

Construction d'un bâtiment en pierre en forme de ruche (beehive en anglais), de 5 m de haut et d'un poids de 150 tonnes, pour le compte la communauté Arte Sella dans les Alpes dolomitiques italiennes. Un sténopé réservé dans la maçonnerie à mi-hauteur envoie une image inversée sur la paroi opposée, laquelle a été enduite de mortier de chaux pour servir d'écran. Le dôme est hérissé de boutisses parpaignes saillantes, une caractéristique empruntée aux clochans irlandais mais des plus rares sur le Continent.

Richard Tufnell, Stone/earth construction possibilities in sub-Saharan Africa / Les possibilités de construction en pierre et/ou en terre en Afrique sub-saharienne, pp. 17-20

Il s'agit de maisons en pierres liées avec de la terre de termitière, un excellent mortier. On apprend que la maçonnerie à sec n'a pas les faveurs des Africains car elle procure un habitat aux insectes dangereux comme les scorpions.

Sean Adcock, Book review: Christian Lassure's Building a drystone hut: an instruction manual, pp. 20-21

Compte rendu très perspicace de la traduction en anglais (par Michael Grant) de notre publication sur l'art et la manière de construire une cabane en pierre sèche.

Justin Money, Pure folly / Une pure folie, pp. 21-24

Récit de la construction d'une folie gothique en pierre sur le domaine d'un riche Américain.. Les bâtisseurs se sont interdit tout parementage des faces vues des pierres, ajoutant un degré supplémentaire de difficulté à leur entreprise mais par la même occasion éloignant l'objet bâti de la vraisemblance (à défaut de l'authenticité) : on disposait en effet d'outils en fer pour tailler la pierre à l'époque des cathédrales gothiques.

L'édification de fabriques en pierre sèche, voilà certainement un nouveau débouché pour les maçons à pierre sèche !

Sean Adcock, Rogues gallery / Le musée des horreurs, p. 24

Dans son dernier musée des horreurs de la maçonnerie en pierre sèche, Sean Adcock jette un œil critique sur les joints mal ou peu croisés. Il faut toutefois remarquer que deux pierres non croisées ou à peine croisées en parement peuvent très bien se chevaucher davantage dans l'épaisseur du mur, en raison de leurs formes irrégulières mais cela ne compense guère le défaut de construction initial.

Sean Adcock, Masterclass: corbelling II / roofs, pp. 25-32

Dans cette troisième livraison de son cours magistral sur la technique de l'encorbellement, Sean Adcock livre les réflexions et intuitions que lui suggèrent les couvrements des cabanes en pierre sèche décrits dans diverses publications et les photos en contreplongée de voûtements en pierre sèche de divers coins de l'Europe et du nouveau monde.

Les deux photos du voûtement d'un trullo de dimensions respectables nous montrent certes une voûte d'encorbellement au départ mais au fur et à mesure que les assises encorbellées se réduisent, l'inclinaison vers l'extérieur se mue en inclinaison vers l'intérieur, donnant une voûte clavée dans le tiers supérieur.

Branch news / Nouvelles de la branche galloise, pp. 33-35

Le fascicule se termine par les dernières nouvelles de la branche galloise de l'association Dry Stone Walling :
1/ compte rendu d'expéditions dans d'anciennes galeries pour en examiner  les ouvrages en pierre sèche à l'abandon (dont de gigantesques murs de soutènement à encorbellement) ;
2/ compte rendu d'une visite faite à une soue en pierre sèche et son enclos (anciennement rattachés à une chaumière à l'abandon), la 2e soue connue du pays de Galles après celle du musée de Saint Fagans.


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Le 23 novembre 2011 / November 23rd, 2011

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