ARCHIVES D'ARCHITECTURE VERNACULAIRE

UNE ANCIENNE GRANGE-ÉTABLE À CHARPENTE À COURBES SOUS COUVERTURE DE CHAUME

AU LIEU-DIT MAREUIL SUR LA COMMUNE DU ROC (LOT)

Christian Lassure

Dans son état au moment du relevé (le 9 mai 1985), le bâtiment détermine au sol un rectangle de 13,20 m de long sur 6,60 m de large hors-œuvre et de 11,90 m de long sur 5,40 m de large dans-œuvre. Les murs sont en maçonnerie de moellons assisés, liés à la terre. L’édifice est coiffé d’une bâtière de tuiles plates, avec coyau de tuiles mécaniques en rive.

Vue du pignon aval depuis la route. Photo © Christian Lassure

L’édifice à été implanté dans un terrain en pente, dans le sens de la déclivité, ce qui a nécessité un certain creusement du sol en amont. Le pignon AD est de ce fait adossé contre le talus en amont; il est aveugle. Le pignon BC est percé d’un petit fenestron à la base de sa partie triangulaire.

 

 

Vue de la partie aval du gouttereau-façade depuis la cour : On distingue bien, à la limite entre maçonnerie grisâtre et maçonnerie blanchâtre, l'ancienne arase du temps où le bâtiment était couvert en chaume. Photo © Christian Lassure

 

Vue de la partie amont du gouttereau-façade depuis la cour : Le surcreusement est évident au niveau de l'entrée de la grange. Les blocs à la base des piédroits se retrouvent dégagés et comme surélevés. Les vantaux ont été prolongés en bas avec des planches. Photo © Christian Lassure

L’analyse archéologique du bâti en pierre met en évidence un certain nombre de modifications par rapport à l’état initial :

- le pignon AD à été complètement refait ainsi que la moitié amont du gouttereau CD;

- le sol devant le gouttereau-façade, légérement déclif à l’origine, à été surcreusé de 90 cm en amont de façon à obtenir une plus grande horizontalité; le soubassement du mur se trouve ainsi mis à nu;

- le sol intérieur également à été surcreusé.

La bâtière de tuiles est portée, à intervalles irréguliers, par trois fermes d’arbalétriers courbes (F1 - F2 - F3), dont une (F1) a été ultérieurement modifiée :

- en F1, on a un couple d’arbalétriers courbes (section : 18 x 18 cm - longueur : 5,80 m), posés sur des dés vers la base des murs et enserrant, entre leurs têtes, la faîtière (hauteur de la faîtière par rapport au sol primitif : 5,55 m); deux faux entraits relevés successifs, à tenon passant chevillé dans les arbalétriers, maintiennent l’écartement de ces derniers; un tirant boulonné (section : 21 x 18 cm) a été interpolé tardivement; il porte un plancher servant de fenil;

Le couple d'arbalétriers F1 avec des deux faux-entraits successifs au-dessus de son entrait-tirant tardif (caché par le foin disposé sur la barge). Photo © Christian Lassure

Les deux faux-entraits successifs et la panne faîtière enserrée entre les têtes des arbalétriers. Photo © Christian Lassure

Le tenon passant du faux-entrait bas.

- en F2 et F3, les couples d’arbalétriers sont triangulés dès l’origine, les pieds des arbalétriers posant sur un entrait (section : 12 x 20 cm) ; ces entraits servent à établir une barge à entasser le foin; on remarque la présence de trous de chevilles à intervalles réguliers sur les faces de chaque arbalétrier.

La face intérieure du pignon aval et le couple d'arbalétriers triangulés F3 (l'arbalétrier de droite est occulté par un cache utilisé lors de la prise de la photo pour éviter le contrejour). Photo © Christian Lassure

 

Articulation de l'arbalétrier et de l'entrait de la ferme No 2. Photo © Christian Lassure

Les chevrons s’accrochent à la faîtière par une cheville les traversant et prennent appui sur la sablière courant sur chaque gouttereau ; ils reposent, à mi versant, sur une panne retenue par le tenon passant du faux-entrait bas; un coyau vient adoucir le bas du versant.

Avec les pignons, les trois fermes déterminent trois travées de profondeur irrégulière :

- la travée 1 sert d’étable à ovins en bas et de fenil en haut;

- la travée 2 sert, pour une moitié, d’espace où mettre la charrette (en position relevée), pour l’autre, de fenil;

- les travées 2 et 3 servent, en bas d’étable à vaches et d’écurie pour un mulet, en haut de fenil.

Le type de charpente rencontré ici suppose à l’origine une couverture légère, n’entraînant pas de fortes poussées sur les gouttereaux : en d’autres termes, une couverture en chaume de seigle. Une charpente similaire à été signalée en 1956 par Jean Compagnon à Carman sur la commune de Creysse : quatre couples d’arbalétriers courbes, non triangulés et posés sur le sol, portent la bâtière couverte en glui d’une grange-étable en pan de bois et torchis (1).

On peut raisonnablement penser que le passage du chaume à la tuile, joint au surcreusement du sol intérieur, à nécessité l’interpolation d’un entrait boulonné en F1 pour éviter que les pieds des arbalétriers, désormais surélevés, ne s’écartent l’un de l’autre et ne renversent les murs. Peut-être même, la réfection de la partie amont du gouttereau CD s’explique-t-elle par un tel renversement consécutif à un alourdissement de la charge de la toiture.

NOTE

(1) Jean Compagnon, Notes et matériaux, Enquête d’architecture rurale : moyenne exploitation à Creysse (Lot), dans Arts et Traditions Populaires, No 4, 1956, pp. 331.

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© Christian Lassure - CERAV
Le 9 septembre 2006 / September 9th, 2006 - Complété le 23 septembre 2006 / Augmented on September 23rd, 2006

Référence à citer / To be referenced as :

Christian Lassure
Une ancienne grange-étable à charpente à courbes sous couverture de chaume au lieu-dit Mareuil sur la commune du Roc (Lot)
http://www.pierreseche.com/grange_a_courbes_mareuil.htm
9 septembre 2006

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