SOUVENIRS D'ENFANCE DE LA RUE DU HAUT-PONT (ANNÉES 1950)

L’ARRIVÉE À SAINT-AMAND

À la rentrée scolaire de 1953, mon père fut nommé adjoint d’enseignement au lycée de garçons de Nice (1). Nous quittâmes donc Saint-Amand pour nous installer à 1000 km de là. Nous devînmes, par la force des choses, des Niçois. Pendant cinq années, de 1953 à 1958, nous ne retournâmes à Saint-Amand qu’une ou deux fois par an, aux vacances d’été et parfois de Pâques, au prix d’un long périple automobile de deux jours, à raison de 500 km par jour.

La Tour de Saint-Amand dans les années 1950 (carte postale à bordure blanche et aux bords dentelés)

Ce n’était pas une mince affaire que ce trajet, avec, sur la banquette arrière de la 203 Peugeot, trois garçons respectivement de 11, 8 et 5 ans (en 1953). Certes, mon père prévoyait toujours des illustrés pour nous occuper mes frères et moi mais il suffisait que l’un de nous ait terminé de lire son album avant son voisin pour presser celui-ci de finir le sien séance tenante. Et puis la lecture des illustrés ne durait qu’un temps. La voie était alors libre pour des chamailleries incessantes qui gênaient le conducteur. Mon père finissait par se mettre dans une rage noire et, après avoir arrêté la voiture sur le bas-côté de la route, il se retournait et nous administrait une raclée mémorable. Un calme boudeur régnait ensuite, du moins pour un temps.

Une autre occupation, en dehors de la lecture, était de relever le numéro d’immatriculation des voitures que l’on croisait, mais la lassitude venait vite. Il nous restait à regarder le paysage qui défilait. Après les gifles paternelles, ce passe-temps s’imposait sans difficulté. De fait, il occupait une bonne partie du trajet (à l’aller comme au retour). Nous avons ainsi pris conscience, très tôt, de la variété des paysages et de la « profondeur » du pays, depuis la Côte d’Azur jusqu’au Hainaut, en passant par l’Esterel, la vallée du Rhône, la vallée de la Saône, le plateau de Langres, la Champagne.

Le 2e jour, aux alentours de Saint-Quentin, dans la Somme, l’ambiance dans la voiture changeait : la fin du calvaire était proche. Enfin, lorsque la 203 déboulait dans le centre de Saint-Amand par la rue d’Orchies ou la rue de Valenciennes, trois oiseaux sur la banquette arrière se mettaient à siffloter et fredonner. Impatients, nous guettions l’apparition du clocher de la Tour abbatiale, signe que nous étions arrivés à bon port.

 
(1) Aujourd’hui lycée Masséna.
 
© CERAV
Mis en ligne le 15 juillet 2012
 

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